La présidence brésilienne du G20 veut une taxation mondiale des plus riches
La présidence brésilienne du G20 veut mettre en place un impôt international touchant les ménages les plus fortunés, après les accords déjà obtenus sur la taxation des géants du numérique et des multinationales, appelant à lutter contre les inégalités.
"Sans une amélioration de la coopération internationale, ceux qui sont tout en haut continueront à trouver le moyen d'éviter les systèmes de taxes existants", a déclaré mercredi le ministre des Finances brésilien Fernando Haddad, dont le pays préside cette année le G20, lors d'une conférence de presse organisée lors des réunion du FMI et de la Banque mondiale.
Il a appelé notamment à plus de transparence et à un échange d'informations entre les États.
"Les inégalités progressent et les objectifs de développement soutenables risquent de ne pas être atteints. Pour ces raisons, j'ai appelé à une nouvelle mondialisation 2.0 lors de la réunion du G20. C'est dans ce contexte que s'inscrit une coopération internationale sur l'imposition", a-t-il encore souligné.
Le Brésil, dirigé par le président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, a fait de la question de l'imposition des plus riches un des principaux sujets de sa présidence du G20. Et au Canada, le gouvernement de Justin Trudeau a dévoilé mardi de nouvelles taxes sur les plus riches pour financer notamment le logement.
Au niveau mondial, dégager des revenus supplémentaires est d'autant plus nécessaire que "nous faisons face à une crise sociale et environnementale mondiale", a ajouté le ministre.
Cette taxation est "assez facile à mettre en place, d'un point de vue technique. D'autant que la demande démocratique pour ce type de taxation est écrasante. D'un point de vue pratique, c'est très simple et nous voyons comment le faire rapidement", a souligné l'économiste Gabriel Zucman, qui défend une taxe de 2% annuelle sur le patrimoine des 3.000 personnes les plus riches, lors d'une conférence de presse.
- Chemin semé d'embûches -
Une telle taxe rapporterait près de 250 milliards de dollars, selon un rapport publié mardi par l'ONG Global Citizen, qui cite cette taxation parmi les six sources de revenus potentielles pour les États afin de financer leurs investissements dans la transition climatique.
La fortune des personnes les plus riches a collectivement augmenté de 2,7 milliards de dollars par jour depuis 2020, et ceux-ci émettent en moyenne un million de fois plus de dioxyde de carbone qu'une personne moyenne, détaille l'ONG.
Si une taxe de 2% peut sembler faible, elle représente en fait "50% du rendement du capital, en plus des impôts sur le revenu s'ils payaient l'impôt sur le revenu. Cela porterait leur taux d'imposition à un taux très élevé", a détaillé auprès de la presse l'économiste Joseph Stiglitz.
Mais plus de 3.000 milliards de dollars sont actuellement nécessaires, annuellement, pour faire face aux défis du réchauffement climatique, avait précisé plus tôt la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva.
"Cette proposition a le soutien de la présidence du G20", mais aussi celui "du gouvernement français et de nombreux pays européens, et je pense que c'est un très bon point de départ", a assuré le ministre français de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, lors d'une conférence de presse commune avec son homologue brésilien.
Le président américain Joe Biden, lui aussi, avait plaidé en mars devant le Congrès pour imposer les milliardaires.
- "Révolution fiscale internationale" -
Cette nouvelle taxation constituerait le "troisième pilier qui doit permettre d'achever la révolution fiscale internationale", a encore souligné Bruno Le Maire.
Un accord, en effet, a déjà été trouvé en octobre 2021, pour taxer les géants du numérique et imposer un impôt minimum aux multinationales.
Et celui-ci est loin d'avoir été ratifié par chacun des 136 pays signataires. Aux Etats-Unis, le président Joe Biden soutient cette réforme, mais le Congrès, très divisé, ne l'a toujours pas adopté.
En octobre 2021, 136 pays, dont la Chine et les États-Unis, sous l'égide de l'OCDE, étaient parvenus à s'entendre sur un accord international, qui comporte deux "piliers".
Le "Pilier 1" vise les multinationales, et notamment les géants du numérique, et consiste à réallouer une part de leur impôt sur les bénéfices aux pays dans lesquels elles réalisent leurs activités et non plus uniquement là où leurs sièges sociaux sont installés.
Le "Pilier 2" correspond à l'instauration d'un taux d'impôt effectif minimum d'au moins 15% sur les bénéfices des multinationales, pour sonner le glas des paradis fiscaux et taxer les entreprises là où elles réalisent leurs recettes.