Le projet Grand Inga sera structurant pour la RDC
Le projet du Grand Inga, qui doit être officiellement lancé d’ici quelques bientôt, offre une occasion unique structurante pour la RDC. À eux seuls, les travaux de la phase III dont la capacité sera de plus de 11 000 MW nécessitera des investissements de plus de 14 milliards USD.
Ce mégaprojet sera structurant de cinq façons. Dans un premier temps, il faut créer un cadre légal, organisationnel et administratif permettant de diriger et guider les parties prenantes – investisseurs, maîtres d’œuvres, constructeurs, gestionnaires, clients – d’atteindre les objectifs ambitieux du projet. Pour ce faire il faut renforcer les capacités de leadership économique, commercial, technique et financier de l’État congolais.
La transformation de l’Agence de Développement et Promotion du Grand Inga (ADPI-RDC) d’un simple office relevant de la présidence de la république à une société d’état permettra de créer ce cadre tout en assurant la transparence, la reddition de compte, la bonne gouvernance et l’instauration des pratiques de saine gestion. La formation et l’accompagnement des dirigeants et cadres de l’ADPI-RDC sera une partie intégrante de ce renforcement de capacité et fournira un exemple positif et rassembleur pour l’ensemble des acteurs impliqués.
Il aura en plus des retombées intangibles à long terme, car les cadres et gestionnaires de la société auront un effet d’entraînement sur tout le pays en obtenant de nouveaux emplois et en devenant un centre d’excellence en saine gestion et bonne gouvernance d’entreprise.
Le deuxième volet structurant du projet Grand Inga sera de créer une demande intérieure pour des fournisseurs capables de rencontrer les hautes exigences des investisseurs et entreprises internationaux et des autres pays participant par leurs capitaux, leur demande en électricité et leur expertise.
Par exemple, s’il faut produire du béton et des barres d’armature en acier localement, il va de soi que les produits devront être de la qualité et de la durabilité nécessaires pour assurer la longévité des barrages et des infrastructures attenantes, par exemple, les câbles électriques, les structures de transmission, les routes et autres investissements en distribution et entretien. Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres éléments qui contribueront au développement à long terme de la base industrielle de la RDC. Des exemples dans les services connexes sont les capacités en génie, en financement, en comptabilité, en distribution, en logistique, en approvisionnement, en vente et marketing et bien d’autres.
Le troisième élément structurant du mégaprojet Grand Inga concerne la production électrique qui en sera l’objectif ultime. Les projections ultimes de capacité électrique du Grand Inga dans toutes ses phases sont de l’ordre de 44 000 MW. La phase III à elle-même permettra de produire plus de 11 000 MW. Le gouvernement de la RDC négocie actuellement une entente avec le gouvernement de l’Afrique du Sud pour lui fournir 5 000 MW, ce qui constituera une importante source de devises et permettra d’assurer une demande à long terme. Une telle entente à long terme à aussi l’effet de rassurer les parties prenantes quant à la sécurité de leurs investissements et leur assurera un retour sur investissement justifiant le degré de risque et d’incertitude. Il restera donc plus de 6 000 MW pour le marché intérieur de la RDC. Les consommateurs et entreprises pourront acheter la production électrique de Grand Inga, ce qui aura un effet de choc pour l’économie et le bien-être de la population entière.
Le quatrième effet structurant du Grand Inga sera l’effet d’entraînement pour le pays, sa population et ses autres acteurs économiques. Les entreprises fournisseurs de produits et services qui seront créées ou qui prendront de l’expansion augmenteront leur demande pour d’autres produits et services provenant de fournisseurs congolais. De nouvelles entreprises et des emplois résulteront de toute cette activité économique et commerciale. Les cadres, gestionnaires, ingénieurs et techniciens formés par l’ADPI-RDC ainsi que les fournisseurs congolais et internationaux seront aptes à lancer leurs propres entreprises ou à rayonner autrement dans tout le pays. Le projet Grand Inga présente la possibilité de surmultiplier les bénéfices à long terme.
Le cinquième aspect structurant du Grand Inga concerne les bénéfices fiscaux que l’état congolais pourra en tirer, principalement sous forme d’impôts corporatifs. Les investissements auront l’effet d’augmenter les commandes, ce qui augmentera l’emploi et l’activité économique en général, ce qui permettra d’augmenter les impôts, ce qui permettra d’améliorer les investissements en services publics, surtout en termes d’infrastructure et d’éducation.
Tous ces bénéfices n’apparaîtront pas du jour au lendemain. Il s’agit d’un immense programme échelonné sur 20, 30, voire 40 ans! Il faudra de la stabilité politique, juridique, sécuritaire et économique. Les gouvernements successifs devront maintenir le cap sur plusieurs décennies. Il restera donc au peuple congolais de décider d’investir et d’agir pour le long terme et l’avenir de sa descendance.
(*) Richard Martin, Co-fondateur et Président-directeur général, de L’Acdémie canadienne de leadership et développement du capital humain