ANTHONY NKINZO : Transformer la RDC en un hub logistique et financier pour l'Afrique
L'ANAPI en fait son cheval de bataille
Le Directeur Général de l'Agence Nationale pour la Promotion des Investissements, ANAPI en sigle, est l’invité du Magazine Diplomat investissement et a bien accepté de répondre à nos questions, après sa participation à la XIIème conférence diplomatique de Kinshasa et à l'Expo 2020 Dubaï aux Émirats Arabes Unis. Dans ses réponses, le Directeur Général de l'ANAPI, Monsieur Anthony Nkinzo fait savoir que le travail abattu en ce moment par son Agence contribue notamment à la vision de transformer la République Démocratique du Congo en un hub logistique et financier pour le continent Africain. En marge de la participation de la RDC à la 11ème édition de l'Annual Investisment Meeting (AIM), l'ANAPI a eu à vendre les atouts du pays pour assumer ce statut.
Face aux enjeux nés du nouveau contexte économique internationale, l'ANAPI a tenu à associer les diplomates congolais à son combat d'attirer les investissements directs étrangers (IDE). Raison pour laquelle, lors de la XIIème conférence diplomatique tenue à Kinshasa du 26 au 28 février 2022, l'ANAPI avait sollicité du Ministère des Affaires Étrangères un partenariat structurel avec les représentations diplomatiques. En effet, les diplomates jouent un rôle majeur de conseillers et d'observateurs de la réalité politico- économique du pays. De ce fait, il est essentiel que la diplomatie congolaise participe aux efforts d’attraction des investissements directs étrangers dans notre pays.
Magazine Diplomat investissement : Monsieur le Directeur Général vous avez participé à une série d’activités à Dubaï, aux Émirats Arabes Unis, notamment à l'Expo 2020 Dubaï qui se veut une vitrine basée sur l'attrait de nouveaux investissements et servir au rayonnement de la RDC, ce qui est considérable. Quel bilan faites-vous de cette participation et quels sont les résultats que vous avez obtenus pour la RDC ?
Directeur Général : En effet, l’Agence Nationale pour la Promotion des Investissements (ANAPI) a eu une programmation assez intense à Dubaï durant le mois de mars dernier. Nous avons, dans un premier temps, pris part au Forum d’affaires organisé par le Ministère de l’Économie des Émirats Arabes Unis et le Ministère congolais du Commerce extérieur dans le cadre de la promotion des échanges économiques et commerciaux entre les Émirats Arabes Unis et la RDC, et le renforcement des relations bilatérales entre nos deux pays. Ensuite, nous avons assisté à la célébration de la Journée nationale RDC à Expo 2020 Dubaï, laquelle cérémonie a été rehaussée de la présence du Chef de l’État lui-même, Son Excellence Monsieur Félix A. Tshisekedi Tshilombo. Et enfin, conformément à ses missions statutaires, l’ANAPI a coordonné la participation de la RDC à la 11ème édition de l’Annual Investment Meeting (AIM) au cours de laquelle un nombre considérable de startups et de Petites et Moyennes Entreprises congolaises, qui ont bénéficié de notre accompagnement en termes de formations et d’appui logistique, ont eu l’opportunité de présenter leurs projets, produits et services aux milliers d'investisseurs présents à ces assises.
C’est également au cours de cette édition d’AIM 2022, que l’ANAPI s’est vue décerner le prix de la « troisième meilleure Agence de promotion des investissements en Afrique », en reconnaissance des efforts déployés pour promouvoir la RDC comme l’une des meilleures destinations d’investissements en Afrique. Un autre fait marquant, c’est la signature, sous la facilitation de l’ANAPI, d’un Protocole d’accord entre la Société nationale d’électricité (SNEL) et la société émiratie AMEA POWER, pour la réalisation des projets d’infrastructures électriques en RDC, dont une centrale solaire photovoltaïque d’une capacité de 100 mégawatts à construire sur un site qui sera bientôt identifié. À chacune de ces étapes, notre message à nos différents interlocuteurs était simple : avec ses 100 millions d’habitants, sa position géostratégique au cœur de l’Afrique et le vaste marché qu’elle forme avec ses neuf pays voisins, la RDC est appelée à devenir un hub logistique et financier pour le continent. D’ailleurs, la construction du port en eau profonde de Banana avec DP World, et l’installation en cours de VISA dans le pays sont les prémisses de cette destination.
La RDC n’attire pas assez d’investissements directs étrangers, vous l'avez dit aux Ambassadeurs Congolais lors de la XIIe Conférence Diplomatique. À quoi attribuez-vous cette faiblesse et quelle stratégie comptez-vous mettre en place pour attirer plus d’investissements et de capitaux en RDC ?
La RDC a connu dans un passé pas si lointain des périodes troubles qui ont gravement affecté et retardé son développement. Mais nous nous relevons de cela peu à peu. Aujourd’hui, le pays est véritablement entré dans une phase de mutation axée sur la diversification de son économie. Une dynamique qui s’appuie sur la volonté de rétablir les bases d’une économie moderne dont les rouages administratifs sont bien structurés et où la bonne gouvernance est la règle. Une ambition soutenue par la mise en œuvre d’un cadre législatif et légal plus incitatif à l’investissement. La RDC a engagé de grandes réformes, incluant notamment la libéralisation de plusieurs secteurs de l’économie nationale, tels que l’énergie et les assurances; la mise en place d’un guichet unique pour les investisseurs, la rationalisation du système fiscal et la mise en place des parquets spécialisés pour la lutte contre la corruption et les crimes économiques.
Ces réformes, les autres engagements pris auprès des institutions multilatérales, ainsi que la volonté du Gouvernement d’améliorer le climat des affaires, sont autant de signes indiquant que le pays est prêt à attirer les investissements directs étrangers. Et des résultats, nous en obtenons progressivement dans le domaine des investissements directs étrangers. D’après les chiffres de la CNUCED, le volume des flux des IDE s’est élevé à 1,5 milliards USD en 2019, tandis que le volume de stocks des IDE s’établissait à 25,6 milliards USD au cours de la même année. Toutefois, ces chiffres restent faibles quand on considère les potentialités multiples de notre pays. C’est un domaine dans lequel nous pouvons faire beaucoup mieux et sur lequel chacun d’entre nous peut et doit se mobiliser. Tenez, malgré la pandémie du Covid-19 et la crise socio-économique qu’elle a générée, la RDC affiche une bonne dynamique économique, caractérisée notamment par un accroissement significatif des recettes intérieures de 70% en 2021 par rapport à 2020 pour atteindre 11.838 milliards de Francs congolais contre 6.968 milliards en 2020, et surtout une croissance du PIB de 5,7% en 2021 qui est projetée à 6,4% cette année, avec une inflation faible contenue à 6% et une monnaie nationale stable.
Dans un contexte mondial particulièrement difficile, ce tableau devrait encourager tous les hommes d’affaires intéressés par la RDC à poursuivre leurs projets dans le pays pour ceux qui y sont déjà, et y investir pour ceux qui n’y sont pas encore.
Vous avez sollicité du Ministère des Affaires Étrangères un partenariat entre les missions diplomatiques Congolaises et l'ANAPI. À quoi va servir ce cadre de collaboration? Et comment comptez-vous le structurer pour servir au mieux les intérêts de la RDC ?
Un enjeu majeur pour les nations modernes est de se positionner favorablement dans le nouveau contexte économique international pour préserver ou promouvoir leur niveau de richesse, en d’autres termes pour faire face au défi de la globalisation. Et dans la quête d’une plus grande compétitivité pour la RDC à l’échelle régionale et internationale, un élément crucial sur quoi je voudrais insister, c’est la cohérence qui devrait absolument exister entre la transformation intérieure et l’image du pays telle que perçue à l’extérieur; entre ce que nous faisons ici pour réparer le pays, pour le rendre plus attractif, et le discours de nos réseaux à l’étranger. Il nous faut bâtir le «branding Nation» de la RDC! Et dans ce contexte, les diplomates jouent un rôle essentiel de conseiller et d’observateur de la réalité politico-économique d’un pays.
De notre point de vue d’Agence de promotion des investissements, quelle que soit l’orientation que l’on souhaite donner à notre diplomatie, celle-ci devrait néanmoins se fonder les exigences suivantes: contribuer à améliorer l’image de marque de notre pays ; permettre un attrait massif des flux d’investissements directs étrangers; faciliter l’accès de nos entreprises locales aux marchés étrangers, et pourquoi pas influencer certaines règles internationales. C’est donc la raison pour laquelle l’ANAPI souhaite avoir un partenariat structurel avec nos représentations diplomatiques à travers le Ministère des Affaires Étrangères, afin qu’ensemble, nous puissions de façon systématique expliquer aux acteurs économiques étrangers ce que nous faisons, les raisons pour lesquelles investir en RDC est une bonne idée. Et parce que la grandeur de la RDC est aussi le fait des millions de congolais à travers le monde qui créent, qui innovent, qui produisent, se forment, enseignent, administrent ou qui s’installent à l’étranger.
Il importe d’associer pleinement nos compatriotes de la diaspora dans cette stratégie nationale de captation de toute opportunité économique susceptible de contribuer à l’essor et à l’image de la RDC. Il est fondamental de faire appel à leur savoir-faire. Les congolaises et les congolais de l’étranger sont un atout pour notre pays. Ils sont une richesse, une force pour le Congo. Nos réformes doivent leur être expliquées et elles doivent aussi être portées par eux.
Le Président Tshisekedi est reconnu par la Communauté internationale comme un dirigeant mettant en place des réformes importantes pour améliorer le climat des affaires et faire de la RDC un pays attractif. Étant vous-même en relation directe avec les investisseurs, comment percevez-vous ce nouvel élan impulsé par le Chef de l’État et quelles sont les retombées concrètes pour les populations et le pays ?
Déjà dans son discours d’investiture du 24 janvier 2019, le Président Félix Tshisekedi l’avait affirmé haut et fort : «Par sa situation géographique et en considération des enjeux géostratégiques de ses richesses naturelles et de son capital humain, la RDC porte une espérance pour l’Afrique et le monde». Une évidence pour le Chef de l’État, et une ambition qu’il entend bien concrétiser. Le Président de la République a aussi une vision plus large : l’intégration régionale. À cet effet, la RDC vient d’adhérer à la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), devenant ainsi le 7ème membre d’une organisation régionale qui comptera désormais un marché de 280 millions de consommateurs. Mais l’intégration régionale, elle passera également par la construction d’infrastructures internes et transfrontalières. En effet, la position géostratégique unique de la RDC, au cœur de l’Afrique, devrait faciliter les jonctions entre les pays du continent. En ce qui nous concerne, l’urgence pour nous est d’accélérer l’insertion du pays dans les chaînes de valeurs régionales et mondiales en attirant davantage d’investissements dans les secteurs productifs et en favorisant l’installation sur le territoire national des industries industrialisantes.
Ce qui permettra aux populations locales de tirer le meilleur parti de l’abondante dotation en ressources naturelles et humaines dont bénéficie le pays. Et ce n’est qu’en offrant un cadre propice aux affaires avec une lisibilité claire et une totale transparence, mais également en faisant un Marketing agressif des atouts de notre pays, que nous y arriverons. À ce titre, un autre axe majeur de l’action du Président de la République, c’est l’amélioration du climat des affaires. Preuve de l’appropriation institutionnelle du processus de réformes au plus haut niveau, la Cellule en Charge du Climat des affaires rattachée au Cabinet du Chef de l’État, et avec qui l’ANAPI collabore étroitement sur l’élaboration et le suivi des réformes, prend part aux réunions des Ministères sectoriels pour renforcer l’action de l’Exécutif dans la mise en œuvre de la Feuille de route desdites réformes. Et signe des temps, l’image de la RDC se redore progressivement ; la perception du pays par les milieux d’affaires et les experts s’améliore, elle aussi, positivement.
L’édition 2020 du classement de l’Africa CEO Forum et du cabinet Deloitte a placé la RDC dans le Top 10 des pays africains les plus attractifs en matière d’investissement. Et depuis, l’administration américaine a rétabli l’admissibilité de la RDC aux préférences commerciales offertes par l’AGOA - African Growth and Opportunity Act - après dix ans de suspension. Les choses bougent en notre faveur; c’est maintenant qu’il faut venir en RDC.
Qui est Anthony Nkinzo Kamole ?
Monsieur Anthony Nkinzo Kamole est Directeur Général de l'Agence Nationale pour la Promotion des Investissements de la République Démocratique du Congo (ANAPI). M. Nkinzo a occupé le poste de Associates Partner en charge du volet Juridique et Fiscal au sein du Cabinet ABN Nzailu & Co de Février 2017 à Juillet 2017. De Janvier 2015 à Décembre 2016 et de Septembre 2012 à Décembre 2014, il a successivement occupé les postes de Directeur de Cabinet au Ministère du Portefeuille et de Directeur du Cabinet à la Vice-Primature du Ministère du Budget. M. Nkinzo a évolué comme Tax & Legal Manager au sein du Cabinet PricewaterhouseCoopers en RDC d‘ avril 2012 à juin 2014 en charge du conseil juridique et de l'évaluation fiscale pour les clients multinationaux et locaux ; de Février 2007 à Février 2012 comme Human Ressources Business Partners chez Nestlé Congo SPRL où il a mis en œuvre les politiques internes de Nestlé conformément à la réglementation locale du travail en RDC.
Pendant 4 ans, il a également exercé les fonctions d’agent vérificateur de recouvrements à La Direction Générale des Impôts (DGI RDC) de Décembre 2000 à Février 2004. Mr. Nkinzo possède une Certification en études supérieures approfondies sur le Management Général Avancé de l'Université HEC Paris (France) 2014. Il est licencié en Droit, option Droit Public International de l'Université de Kinshasa, (promotion 1999 à 2000) après son passage à l'Université Catholique de Bukavu d'où il est gradué. Mr. Nkinzo est multilingue: Français, Anglais, Swahili et Lingala.
Contact:
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