Birmanie: Manifestations nocturnes, l'envoyée spéciale de l'ONU met en garde contre un "bain de sang imminent

Birmanie: Manifestations nocturnes, l'envoyée spéciale de l'ONU met en garde contre un

Deux mois après la prise du pouvoir par l'armée, les militants birmans ont organisé des manifestations nocturnes dans tout le pays, alors que l'envoyée spéciale des Nations Unies pour la Birmanie a prévenu qu'un "bain de sang est imminent."

Cet avertissement de Christine Schraner Burgener fait suite à une flambée des combats entre l'armée et les insurgés des minorités ethniques dans les régions frontalières.

Au moins 20 soldats ont été tués et quatre camions militaires ont été détruits lors d'affrontements avec l'Armée de l'indépendance kachin (KIA), l'un des groupes rebelles les plus puissants de Birmanie, selon DVB news.

Un soldat de la KIA cité par Kachin Liberation Media a déclaré que l'attaque avait eu lieu mercredi après-midi.

Reuters n'a pas pu vérifier immédiatement ces informations et un porte-parole de la junte n'a pas répondu à une demande de commentaires.

L'aviation militaire birmane a commencé à bombarder les positions d'un autre groupe, l'Union nationale karen (KNU), pour la première fois en plus de 20 ans, et des milliers de villageois ont fui leurs maisons, la plupart en Thaïlande.

La Birmanie est secouée par des manifestations presque quotidiennes depuis que l'armée a renversé le gouvernement élu d'Aung San Suu Kyi le 1er février, en invoquant des allégations non fondées de fraude lors des élections de novembre. Aung San Suu Kyi et d'autres membres de sa Ligue nationale pour la démocratie (LND) sont maintenus en détention.

AUNG SAN SUU KYI COMPARAÎT DEVANT LE TRIBUNAL

La junte a accusé Aung San Suu Kyi de plusieurs délits mineurs mais pourrait bientôt l'inculper de trahison, passible de la peine de mort, a rapporté Khit Thit Media mercredi.

Reuters n'a pas pu confirmer cette information mais la prochaine audience dans cette affaire doit avoir lieu plus tard dans la journée de jeudi.

Aung San Suu Kyi et l'un de ses avocats, Min Min Soe, ont tenu mercredi leur premier entretien vidéo depuis l'arrestation de l'ex-dirigeante.

"Amay semble en bonne santé, son teint est bon", a déclaré Min Min Soe par téléphone, en utilisant un terme affectueux signifiant "mère" pour désigner Aung San Suu Kyi.

Des députés de sa formation, ont juré de mettre en place une démocratie fédérale afin de répondre à une demande d'autonomie formulée de longue date par les groupes ethniques minoritaires.

L'armée rejette ces propositions et se considère comme la seule institution capable de maintenir l'unité du pays.

Le Comité pour la représentation du Pyidaungsu Hluttaw (CRPH), qui a mis en place le gouvernement civil parallèle, a également annoncé l'abolition d'une constitution de 2008 mise en place par les militaires et qui garantit l'influence de l'armée.

LES ÉTATS-UNIS EXHORTENT LA CHINE À USER DE SON INFLUENCE

L'envoyée spéciale de l'ONU pour la Birmanie, Christine Schraner Burgene, a déclaré aux 15 membres du Conseil de sécurité de l'ONU que l'armée n'était pas capable de gérer le pays et a averti que la situation sur le terrain ne ferait qu'empirer.

Le conseil doit envisager "une action potentiellement significative" pour inverser le cours des événements car "un bain de sang est imminent", a-t-elle déclaré.

Le Conseil de sécurité a jusqu'à présent exprimé son inquiétude et condamné la violence contre les manifestants, mais il a arrêté de qualifier la prise de pouvoir par les militaires de coup d'État et de menacer d'une éventuelle action supplémentaire en raison de l'opposition de la Chine, de la Russie, de l'Inde et du Vietnam.

Selon l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP), au moins 536 civils ont été tués lors des manifestations, dont 141 samedi, le jour le plus sanglant depuis le début des troubles.

Mercredi, les États-Unis ont exhorté la Chine, qui a d'importants intérêts économiques et stratégiques en Birmanie, à user de son influence pour que les responsables du coup d'État militaire rendent des comptes.

Alors que les pays occidentaux ont fermement condamné le coup d'État, la Chine s'est montrée plus prudente et le haut diplomate du gouvernement, Wang Yi, a appelé à la stabilité lors d'une rencontre avec son homologue singapourien Vivian Balakrishnan mercredi.

"La Chine salue et soutient l'adhésion de l'Asean au principe de non-ingérence (...) et l'approche de l'Asean qui joue un rôle positif dans la promotion de la stabilité de la situation en Birmanie", a déclaré le ministère chinois des affaires étrangères dans un communiqué publié après la réunion, faisant référence à l'Association des nations du Sud-Est asiatique (Asean).

Le ministère des Affaires étrangères de Singapour a déclaré que les ministres avaient "appelé à la désescalade de la situation, à la cessation des violences et à l'ouverture d'un dialogue constructif entre toutes les parties."

L'Asean, dont est membre la Birmanie, s'est engagée à ne pas s'immiscer dans les affaires des autres pays, mais sous l'impulsion de l'Indonésie, certains pays ont déployé des efforts diplomatiques pour désamorcer la crise.