L'Iran ferme la porte à l'offre de dialogue de Donald Trump

L'Iran a clairement fermé la porte jeudi à l'offre de dialogue du président des Etats-Unis Donald Trump pour mettre fin à l'escalade des tensions dont les deux pays se renvoient la responsabilité.

Pressée d'étayer la véracité de la menace iranienne brandie depuis plus de dix jours pour justifier des déploiements militaires au Moyen-Orient puis le rappel de diplomates américains en poste en Irak, l'administration du milliardaire républicain a laissé filtrer ces deux derniers jours de nouveaux éléments plus précis.

Un responsable américain a notamment affirmé jeudi à l'AFP que des missiles chargés sur des embarcations traditionnelles dans le Golfe par les Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique d'Iran, étaient "une source d'inquiétude" pour "les militaires et les services de renseignement".

La veille, d'autres responsables avaient fait état d'une "menace imminente" en "lien direct avec l'Iran", mettant en cause notamment des groupes armés pro-iraniens en Irak, qui ont en retour accusé Washington de lancer une "guerre psychologique" pour "provoquer du tumulte".

Le chef de la diplomatie du Royaume-Uni Jeremy Hunt est venu apporter son soutien à la position américaine, après le cafouillage provoqué par un général britannique de la coalition internationale antijihadistes qui avait démenti toute "aggravation de la menace posée par les forces pro-iraniennes". "Nous partageons la même évaluation de la menace renforcée posée par l'Iran" que les Etats-Unis, a tweeté jeudi le ministre britannique.

Dans ce contexte explosif, qui multiplie les risques de confrontation militaire entre les deux ennemis, le président américain souffle comme souvent le chaud et le froid. Ainsi, malgré le ton martial, il a fait plusieurs appels du pied aux dirigeants iraniens.

- Trump et ses faucons -

"Je suis sûr que l'Iran voudra bientôt discuter", a-t-il lancé mercredi. "Je voudrais qu'ils m'appellent", avait-il déjà tenté la semaine dernière.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, lui a opposé une fin de non recevoir.

"Je ne sais pas pourquoi le président Trump est confiant car c'est totalement faux", a-t-il répondu jeudi depuis Tokyo, écartant "toute possibilité" de négociations avec les Etats-Unis.

Il a au contraire accusé Washington de provoquer une escalade "inacceptable".

Et à la "pression maximale" mise en oeuvre par les Etats-Unis à coups de sanctions économiques depuis leur retrait, il y a un an, de l'accord de 2015 sur le nucléaire iranien, le diplomate a vanté la "retenue maximale" dans la réaction de Téhéran.

Malgré la suspension de certaines restrictions à son programme nucléaire, et l'ultimatum lancé aux Européens, signataires de l'accord, pour qu'ils aident l'Iran à contourner les sanctions américaines, le ministre iranien a ainsi assuré que son pays maintenait son "engagement" vis-à-vis de la communauté internationale dans le cadre de ce texte censé l'empêcher de fabriquer la bombe atomique. Mohammad Javad Zarif doit se rendre vendredi en Chine, autre signataire resté fidèle à l'accord.

Jusqu'ici, le guide suprême iranien Ali Khamenei a assuré qu'il "n'y aurait pas de guerre avec les Etats-Unis", tandis que Washington a martelé ne pas vouloir de conflit avec l'Iran.

Mais l'administration Trump est soupçonnée d'alimenter l'escalade en exagérant le niveau de la menace. Face à la pression des parlementaires démocrates, dont certains l'accusent de vouloir provoquer un conflit, elle s'est ainsi résolue à partager les informations de ses services de renseignement avec une poignée d'élus, à huis clos.

"J'apprécie ce que j'entends venant du président, le fait qu'il n'a pas envie de cela", a déclaré la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, soulignant que certains "supporteurs" de Donald Trump étaient toutefois "des va-t-en-guerre".

Les médias américains se font en effet l'écho de divisions au sein du gouvernement américain, et d'un Donald Trump de plus en plus agacé par les faucons, à commencer par son propre conseiller à la sécurité nationale John Bolton. Selon le New York Times, il a prévenu son ministre de la Défense Patrick Shanahan qu'il ne voulait pas d'une guerre avec l'Iran.

Pour de nombreux observateurs, John Bolton serait même désormais sur la sellette.

"Une guerre avec l'Iran est possible, ce qui est inquiétant, mais je pense qu'il est plus probable que Trump limoge Bolton", a estimé Tom Wright, du cercle de réflexion Brookings Institution