Colombie: le candidat de droite, Ivan Duque, élu président

Colombie: le candidat de droite, Ivan Duque, élu président

Le candidat de droite, Ivan Duque, a remporté dimanche l'élection présidentielle en Colombie et va succéder à Juan Manuel Santos, à l'issue d'un duel inédit avec un représentant de gauche, Gustavo Petro, et crucial pour l'accord de paix avec l'ex-guérilla Farc.

Selon des résultats officiels portant sur 96,99% des suffrages dépouillés, Ivan Duque, 41 ans, candidat du Centre démocratique (CD), a recueilli 54,07% des voix contre 41,72% à Gustavo Petro, 58 ans, du mouvement Colombie Humaine, premier candidat de gauche à parvenir aussi loin dans une course présidentielle.

Ivan Duque devient le plus jeune chef d'Etat de Colombie depuis 1872, à l'issue de cette première présidentielle depuis la paix avec les Farc et qui s'est déroulée dans le calme, avec une participation de 52,18%

Dauphin du populaire ex-président Alvaro Uribe (2002-2010), farouche opposant à l'accord avec les Farc qui a polarisé le pays, le futur président, qui prendra ses fonctions le 7 août, a promis de modifier ce texte selon lui trop laxiste envers les ex-chefs guérilleros.

Dans la matinée, M. Santos, 66 ans, avait qualifié cette présidentielle de "transcendantale", soulignant que "pour la première fois, un ex-commandant des Farc a voté en démocratie, sans armes et comme leader d'un parti politique".

L'accord, qui a permis le désarmement de 7.000 rebelles, a valu à ce président de centre-droit le Nobel de la Paix, mais aussi une impopularité de 80% dans ce pays de 49 millions d'habitants. Au pouvoir depuis 2010, il ne pouvait se représenter après deux mandats.

- Sur le chemin de la réconciliation? -

Le chef du parti Farc, Rodrigo Londoño, a estimé pour sa part qu'il fallait rester "vigilants dans cette lutte pour construire les chemins de la réconciliation, qui nous permettent d'édifier en paix la nouvelle Colombie".

Le pacte signé fin 2016 a clos plus de 52 ans d'affrontements avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie, devenues la Force alternative révolutionnaire commune (Farc), mais la Colombie peine à émerger du conflit.

Elle reste confrontée à une corruption et des inégalités criantes, notamment en matière d'éducation et santé, ainsi qu'à la violence de groupes armés se disputant le narco-trafic dans ce pays, premier producteur mondial de cocaïne.

La droite y règne depuis toujours. Ivan Duque avait remporté 39,14% des voix au premier tour le 27 mai contre 25,08% à Gustavo Petro, ancien maire de Bogota et ex-guérillero du M-19 dissout. La participation avait été de 53,9%. Habituellement moins de la moitié des 36 millions d'électeurs votent.

Novice en politique avec jusque là un seul mandat comme sénateur, l'avocat et économiste Ivan Duque se défend d'être la "marionnette" d'Alvaro Uribe. Les sondages le créditaient de plus de 50%, six à quinze points devant Gustavo Petro.

La gauche colombienne, divisée, a longtemps pâti de la présence des guérillas.

"Nous demandons à Dieu et au peuple colombien de nous donner la victoire pour transformer le pays", a lancé dimanche matin Ivan Duque, soutenu par les conservateurs, les partis chrétiens, les évangéliques et l'ultra-droite.

Défendant la liberté d'entreprendre pour relancer la 4e économie d'Amérique latine, il a répété vouloir "tourner les pages de la corruption, de la politique politicienne, du clientélisme". Il entend réviser l'accord de paix pour envoyer en prison les chefs Farc coupables de crimes graves et leur barrer l'accès au Parlement.

De son côté, Gustavo Petro, qui entend appliquer le pacte, avait qualifié cette journée d'"historique", assurant vouloir "construire une Colombie humaine en paix, qui se réconcilie avec elle-même".

"J'espère que la gauche ne passe pas car ça a été un échec dans tous les pays du monde", a déclaré à l'AFP Lina Restrepo, 47 ans, administratrice d'entreprise, qui venait de voter pour Ivan Duque.

Gustavo Petro promettait de profondes réformes favorables aux pauvres. Mais il paye sa proximité avec le défunt président vénézuélien Hugo Chavez, bien qu'ayant désavoué son successeur Nicolas Maduro.

- Suspens pour l'accord de paix -

Electeur du candidat de la gauche anti-système, Sergio Roncayo, 39 ans, professeur de philosophie, espérait "un changement qui permette que le pays progresse, que la paix se consolide".

Les deux adversaires sont opposés aussi sur le dialogue avec l'Armée de libération nationale (ELN), dernière guérilla du pays, en cessez-le-feu pour le scrutin. Gustavo Petro voulait le poursuivre; Ivan Duque a annoncé qu'il durcirait la position gouvernementale.

Dans la dernière ligne droite, ils avaient limité les déclarations, tentant de nouer des alliances, notamment au centre dont un candidat, Sergio Fajardo, était arrivé 3e avec 23,7% au premier tour.

Ivan Duque est assuré d'un soutien important au Congrès, où la droite s'est imposée aux législatives de mars.

Pour sa part, la Farc n'avait même pas atteint les 0,5% de voix nécessaires pour dépasser les dix sièges parlementaires octroyés par l'accord.

Clore définitivement le chapitre d'une guerre fratricide, qui a fait au moins huit millions de victimes entre morts, disparus et déplacés, sera la tâche fondamentale du futur président.