Le Parlement catalan rompt avec l'Espagne

Le Parlement catalan rompt avec l'Espagne

Le Parlement de Catalogne a adopté vendredi une résolution déclarant que la région devient un "Etat indépendant prenant la forme d'une République", une rupture sans précédent en Espagne.

Le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy a immédiatement réagi sur Twitter en promettant de "restaurer la légalité" en Catalogne.

La résolution a été adoptée en l'absence de l'opposition, qui avait quitté l'hémicycle, par 70 voix pour, dix voix contre et deux abstentions. Les partis séparatistes - allant de l'extrême gauche au centre droit - sont majoritaires en sièges (72 sur 135) au Parlement.

Les élus ont ensuite entonné l'hymne nationaliste et crié "Vive la Catalogne!".

A l'extérieur du Parlement, plusieurs dizaines de milliers de manifestants indépendantistes ont salué par des clameurs de joie l'annonce du résultat.

"Oui, nous avons gagné la liberté de construire un nouveau pays", a tweeté le vice-président catalan Oriol Junqueras.

Cette résolution constitue "la République catalane, comme Etat indépendant et souverain, de droit, démocratique et social".

Dans ses attendus, elle demande à l'exécutif catalan de négocier sa reconnaissance à l'étranger, alors qu'aucun Etat n'a manifesté son soutien aux indépendantistes.

Avant ce vote, l'opposition avait quitté l'hémicycle, laissant derrière elle des drapeaux de Catalogne et de l'Espagne, côte à côte sur les sièges du parlement.

Brandissant la résolution, Carlos Carrizosa, du parti anti-indépendantiste Ciudadanos, avait déclaré: "Ce papier que vous avez rédigé détruit ce qu'il y a de plus sacré, la coexistence" en Catalogne.

"Comment a-t-on pu en arriver là?", s'est demandé Alejandro Fernandez du Parti populaire (conservateur) de Mariano Rajoy, évoquant "un jour noir pour la démocratie".

- 'Etat catalan' -

La Catalogne n?en est pas à ses premières tentatives d'éloignement du gouvernement central. Mais son exécutif n?était jamais allé aussi loin. Et le dernier épisode remonte à plus de 80 ans.

C'était en 1934. Le 6 octobre, le président du gouvernement autonome de Catalogne, Lluis Companys, proclamait un "Etat catalan dans le cadre d'une République fédérale d'Espagne".

"Catalans!" s'écriait-il alors depuis le balcon du siège du gouvernement catalan. "En cette heure solennelle, au nom du peuple et du Parlement, le gouvernement que je préside assume tous les pouvoirs en Catalogne, proclame l'Etat catalan de la République fédérale espagnole".

La réponse du gouvernement ne s'était pas fait attendre: le commandant militaire en Catalogne avait proclamé l'état de guerre. Les affrontements avaient fait entre 46 et 80 morts, selon les historiens.

Alors que la région menaçait depuis des semaines de faire sécession, le gouvernement de Mariano Rajoy a demandé aux sénateurs l'autorisation de déclencher l'article 155 de la Constitution - jamais appliqué jusqu'alors - qui permet de suspendre de facto l'autonomie de la région.

Il devait obtenir le feu vert du Sénat dans l'après-midi.

Les conséquences de la déclaration d'indépendance comme de la mise sous tutelle de la région par l?Etat sont incalculables.

Inquiétées par l'insécurité juridique, plus de 1.600 sociétés ont déjà décidé de transférer leur siège social hors de Catalogne, agitée depuis des semaines par des manifestations pour et contre l'indépendance. Les banques catalanes accentuaient leur chute vendredi à la Bourse de Madrid.