Venezuela: l'ex-procureure générale s'enfuit en Colombie

Venezuela: l'ex-procureure générale s'enfuit en Colombie

L'ex-procureure générale du Venezuela, Luisa Ortega, l'une des plus farouches critiques du président socialiste Nicolas Maduro, s'est réfugiée vendredi en Colombie, quelques heures après la confiscation des pouvoirs du Parlement par l'Assemblée constituante.

Après avoir transité par l'île caribéenne d'Aruba, "Madame Ortega est arrivée accompagnée de son mari le député German Ferrer", selon un communiqué des services d'immigration.

L'ex-procureure générale "est arrivée à bord d'un vol privé à l'aéroport de Bogota et a rempli ses formalités migratoires correspondantes auprès des autorités colombiennes (...) dans l'après-midi (...) en provenance d'Aruba", selon le communiqué.

Mme Ortega avait été démise de ses fonctions le 5 août par la toute nouvelle Assemblée constituante. Elle était aussi interdite de sortie du territoire vénézuélien et avait vu ses comptes bancaires gelés.

L'annonce de son arrivée en Colombie a été faite peu après que le Parlement vénézuélien, seule institution contrôlée par l'opposition, ait été privé de la majorité de ses pouvoirs par la Constituante, qui poursuit ainsi la reprise en main du pays amorcée par Nicolas Maduro.

Elue fin juillet dans le sang et contestée par une grande partie de la communauté internationale, la Constituante, assemblée de 545 membres tous issus du chavisme - le courant au pouvoir, du nom du défunt Hugo Chavez, président de 1999 à 2013 -, s'est attribuée l'essentiel des pouvoirs du Parlement.

Son initiative marque un nouvel épisode dans la grave crise politique secouant le Venezuela, où les manifestations exigeant le départ du chef de l'Etat élu en 2013, sur fond de naufrage économique, ont fait 125 morts depuis le 1er avril.

Les protestations avaient justement démarré quand la Cour suprême, institution réputée proche du président, s'était arrogée fin mars les pouvoirs du Parlement avant de faire volte-face 48 heures plus tard face au tollé soulevé dans le pays et à l'étranger.

- "De facto l'organe législatif" -

Cette fois, l'Assemblée constituante a annoncé "assumer le pouvoir de légiférer sur les sujets visant directement à garantir la préservation de la paix, la sécurité, la souveraineté, le système socio-économique et financier, les biens de l'Etat et la primauté des droits des Vénézuéliens".

Le décret rappelle que "tous les organes du pouvoir public sont subordonnés à l'Assemblée nationale constituante".

Le Parlement a immédiatement contesté cette décision, affirmant que la Constituante "est nulle et ses actes illégaux et anticonstitutionnels". "La décision d'annulation ne sera pas appliquée par l'Assemblée nationale, la communauté internationale, ni le peuple", a ajouté l'institution sur son compte Twitter.

Le Parlement a obtenu le soutien de l'Organisation des Etats Américains, via son secrétaire général Luis Almagro. Il a déclaré "illégitime et inconstitutionnelle" la décision de l'Assemblée constituante et a demandé une réunion d'urgence de l'OEA.

La présidente de la Constituante, Delcy Rodriguez, a nié qu'il s'agisse d'une dissolution du Parlement, qui selon elle garde certains pouvoirs.

"Non, les paresseux doivent travailler. (Le Parlement) n'est pas dissous, allez travailler et respecter les lois de la République, vous devez respecter le pouvoir constituant", a-t-elle lancé.

Dans une lettre ouverte, la direction du Parlement avait rappelé plus tôt qu'elle ne reconnaissait pas "l'Assemblée nationale constituante frauduleuse, ses mandats et tous les actes émanant d'elle".