Conférence de presse: du calme à l'emportement, Donald Trump comme en campagne

Conférence de presse: du calme à l'emportement, Donald Trump comme en campagne

Il plaisante, vante ses succès passés, passe tour à tour d'une voix posée à un ton menaçant: pour sa première conférence de presse depuis six mois, Donald Trump a joué un registre très proche de celui de sa campagne.

A neuf jours de sa prestation de serment comme 45e président des Etats-Unis, l'homme d'affaires de 70 ans explique, depuis le gratte-ciel qui porte son nom au coeur de Manhattan, avoir un temps cessé de répondre aux questions car "il y avait beaucoup d'informations inexactes".

Au pupitre dans le lobby en marbre de la Trump Tower, à quelques pas de l'escalator d'où il était apparu pour lancer sa candidature le 16 juin 2015, le président-élu distribue les bons et les mauvais et points à ceux qui l'interrogent.

"C'est bon, j'ai compris... vous en avez d'autres ?", lance-t-il à un journaliste qui enchaîne les questions. "Cela a été relaté de manière assez exacte par le New York Times", assène-t-il un peu plus tard évoquant ses projets sur Obamacare.

"Oh, je n'avais jamais entendu ça", ironise le successeur de Barack Obama, agacé, à l'attention d'une jeune femme qui l'interroge sur sa déclaration d'impôt qu'il n'a jamais publiée. "Les seuls qui s'intéressent à cela sont les journalistes..."

"BBC News, encore une merveille", lance-t-il ironique, à un correspondant du groupe britannique qui lui pose une question.

A sa droite, à quelques mètres du podium, son vice-président Mike Pence et sa famille: ses fils Eric et Donald Jr, sa fille Ivanka.

Symbole de la nouvelle répartition des rôles: le mari de cette dernière, Jared Kushner, qui vient d'être nommé haut conseiller à la présidence, est de l'autre côté de la pièce, avec le reste de la future équipe présidentielle.

- "Non, pas vous !" -

Les deux mains posées de chaque côté du podium, le début de conférence de presse est plutôt calme: "J'ai un grand respect pour la liberté de la presse et tout ça".

Il reprend nombre de ses expressions de campagne, assure qu'il sera "le plus grand créateur d'emplois que Dieu ait jamais créé", évoque "un mouvement que le monde n'avait jamais vu".

"Nous aurons besoin d'une dose d'autres choses aussi, dont un peu de chance", ajoute-t-il, évitant de rentrer dans les détails - "des trucs très compliqués" lâche-t-il à propos de la façon dont il entend remplacer la réforme de la couverture-maladie mise en place par Barak Obama.

Mais le ton s'échauffe lorsque le prochain locataire de la Maison Blanche évoque les informations diffusées la veille par plusieurs médias américains sur ses liens présumés avec la Russie. Index dressé, il parle des "choses horribles" faites par son opposant Hillary Clinton durant la campagne.

Il attaque avec virulence le site Buzzfeed - "un tas d'ordures" - qui a publié les 35 pages de notes au coeur de la tempête. Il s'en prend longuement au correspondant de CNN, assis au premier rang, qui tente en vain de poser une question.

"Non, pas vous ! Votre organisation est horrible. Taisez-vous ! Non, je ne vous donnerai pas de question".

Au milieu du brouhaha des journalistes tentant de capter son attention, la conférence de presse s'achève de manière inattendue, abrupte.

"J'espère que dans huit ans, je reviendrai et je dirai (à ses deux fils qui géreront son groupe immobilier): "Oh, vous avez fait fait du bon boulot".

"Et s'ils font du mauvais boulot, je leur dirai: vous êtes virés", conclut-il en riant avant de s'engouffrer dans l'ascenseur de l'immense tour de verre où il vit et qu'il quittera bientôt pour rejoindre la Maison Blanche, plus vieux bâtiment public de Washington.

Trump dénonce de "fausses informations" le liant à Moscou

Donald Trump s'en est pris mercredi aux services de renseignement et à la presse pour dénoncer de "fausses informations" sur d'éventuels liens secrets avec Moscou, devenues un des sujets des auditions au Congrès de ses futurs ministres qui se poursuivront jeudi.

"Ce sont des fausses informations. C'est bidon. Ces choses ne se sont jamais passées", a lancé Donald Trump lors de sa première conférence de presse depuis juillet, dans le hall bondé de la Trump Tower à New York, après la publication, par le site Buzzfeed, de 35 pages de notes alléguant de liens de longue date entre son entourage et le Kremlin.

le site Buzzfeed Selon ces documents, à l'authenticité incertaine, les services russes d'espionnage disposent également d'informations compromettantes ("kompromat") compilées au fil des années, notamment sur des rencontres avec des prostituées à Moscou.

Le Kremlin a nié l'existence d'un tel dossier.

Devant plus de 250 journalistes, le magnat de 70 ans a également annoncé des mesures pour prévenir tout futur conflit d'intérêt, des garde-fous jugés insuffisants par ses opposants démocrates.

Pendant une petite heure il a tâché de projeter l'image d'un homme prêt à assumer la fonction présidentielle, évoquant la réforme de la santé, la prochaine construction d'un mur à la frontière mexicaine, ou une réorganisation des appels d'offres dans la pharmacie.

- Critiques 'malavisées' -

Mais outré par la diffusion des allégations sur la Russie, il a critiqué le site Buzzfeed

--"un tas d'ordures"-- et a refusé d'accorder une question à un reporter de CNN.

La chaîne d'information a rapporté mardi que les chefs du renseignement américain en avaient présenté un résumé de deux pages vendredi à M. Trump, ce que son entourage a démenti.

Ces notes qui circulaient depuis des semaines à Washington ont été rédigées de juin à décembre 2016 par un ancien agent des services secrets britanniques, Christopher Steele, 52 ans. Il a travaillé plusieurs années à Moscou pour le MI6 et a bonne réputation dans le monde du renseignement, selon le Wall Street Journal qui cite un ancien agent de la CIA.

M. Steele disposait de multiples sources qui lui ont parlé d'autres vidéos ainsi que d'enregistrements compromettants, a ajouté mercredi le journaliste de la BBC Paul Wood.

Le futur commandant en chef s'en est aussi pris aux services américains, se demandant s'ils n'étaient pas la source de ces fuites.

"C'est scandaleux, scandaleux, que les agences de renseignements aient permis (la publication) d'une information qui s'est révélée être erronée et fausse", a-t-il dit. "C'est le genre de choses que l'Allemagne nazie faisait".

Une attaque qui lui a valu une réponse cinglante de l'administration sortante. Ces critiques sont "très malavisées", a lâché le porte-parole de la Maison Blanche, Josh Earnest.

Au Congrès, l'opposition démocrate ne s'apaisait pas. L'élu Jim McGovern a relevé que "Trump refus(ait) de dire si son équipe avait eu des contacts avec la Russie pendant la campagne".

- 'Respect' russe -

Le futur président a par ailleurs reconnu pour la première fois que la Russie était à l'origine des piratages informatiques du parti démocrate.

La divulgation sur WikiLeaks de milliers de messages avait déstabilisé la candidate.

M. Trump doutait jusqu'à présent du consensus du renseignement américain, qui a publiquement accusé le président russe d'avoir lancé une campagne de piratages et de désinformation pour discréditer la démocrate et aider le républicain.